Nous avons déjà évoqué le binge drinking dans un précédent blog, cette modalité de consommation intense, explosive qui se produit sur une durée courte. Il existe plusieurs définitions, mais on peut retenir que cela correspond chez l’homme et la femme à des consommation supérieures ou égales à respectivement 7 et 6 verres d’alcool, et cela pendant un intervalle de moins de 2 heures.
Le fait de consommer de cette manière favorise la survenue de taux d’alcool très important dans la circulation sanguine ce qui augmente significativement le risque de toxicité. En effet, et il est toujours bon de le rappeler, la toxicité de l’alcool est dose-dépendante. Donc, plus il y en a et plus c’est toxique.
Ce mode de consommation est donc toxique, mais il est vraiment préoccupant chez les adolescents et les adultes jeunes. En effet, ces consommations excessives favorisent les risques d’accidents de la voie publique et la survenue d’un état de vulnérabilité. Cette vulnérabilité peut se traduire par des violences subies, qu’elles soient physiques ou sexuelles. Il ne faut pas oublier que la consommation excessive d’alcool augmente le risque d’être victime de violence, mais aussi auteur de violence, notamment sexuelle. Profitons de ce texte pour rappeler que l’alcool est la première drogue du violeur très loin devant les benzodiazépines ou le GHB.
Il existe aussi bien sûr des risques de toxicité aiguë sur certains organes dont le cœur et le cerveau. Le cerveau est un organe qui continue à se développer longtemps dans la vie et qui n’atteint sa maturité qu’à l’âge de 25 ans environ. De plus, les dernières zones qui vont atteindre la maturité sont situées dans la région frontale. Elles correspondent aux zones de prises de décision, celles qui nous aident par exemple à gérer notre alimentation et à éviter de manger trop de gâteaux ou de sucreries.
On comprend donc aisément pourquoi on peut plus facilement prendre de mauvaises décisions quand on est jeune (il n’est pas nécessaire de faire beaucoup d’efforts de mémoire pour trouver des exemples chez chacun d’entre nous).
Le fait d’avoir du binge drinking de façon précoce favorise par ailleurs la survenue de dépendance à l’alcool plus tard avec toutes les conséquences négatives chroniques.
Enfin (bien sur ces informations ne sont pas exhaustives), le binge drinking chez les jeunes favorisent le risque de développer des troubles cognitifs, notamment des troubles des fonctions suivantes : capacités de mémorisation, de concentration et d’apprentissage. Ces troubles sont gênants pour tout le monde, mais prennent un relief particulier chez les étudiants, puisqu’il s’agit de cerveaux jeunes (donc fragiles) qui doivent acquérir chaque jour de nouvelles connaissances (donc être opérationnels). Par ailleurs, les troubles cognitifs ne sont pas visibles initialement, et donc sont volontiers négligés.
L’ensemble de ces données incite à imaginer des soins spécifiques « anti binge drinking » pour les jeunes et bien sûr, pour les moins jeunes. Concernant les étudiants, il existe des actions menées par les pairs (autres étudiants qui se mobilisent contre l’alcool) qui donnent des résultats intéressants. Cela reste toutefois insuffisant et nous avons souhaité proposer une aide supplémentaire grâce à une application médicale, ce type d’outil étant bien adapté aux jeunes consommateurs.
Nous avons déjà créé une application médicale qui a pour objectif d’aider les consommateurs réguliers excessifs à diminuer leur consommation (App MyDéfi). Le programme de soins de MyDéfi, dans sa forme actuelle, n’est pas spécifique de la problématique du binge-drinking.
Afin de pouvoir développer et évaluer un programme binge-drinking, nous avons participé à un concours organisé par l’Institut de Recherche en Santé Publique (IReSP).
Notre projet a été sélectionné, ce qui démontre son intérêt. Cela va nous permettre, non seulement de créer un programme spécifique, mais encore de le tester dans la « vraie vie » sur un échantillon d’étudiants.
Ce projet collaboratif très ambitieux est porté par plusieurs partenaires : une équipe INSERM de l’Université de Picardie Jules Verne, l’équipe d’Addictologie clinique du CHU de Nîmes, une équipe de recherche en Neuropsychologie de l’Université Paul Valéry Montpellier 3 et des développeurs.
Actuellement, il n’existe pas d’application médicale fonctionnelle dans cette indication et c’est pourquoi, voir ce projet sélectionné par l’IReSP nous semble être une nouvelle très importante. Cela va nous permettre d’atteindre les objectifs fixés durant la période d’étude de 2ans. Nous communiquerons au fur et à mesure les avancées de ce projet novateur qui pourrait à terme amener un nouvel outil d’aide pour de nombreux consommateurs.