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ANXIÉTÉ : Faites le TEST

Comment définir l’anxiété ou les « troubles anxieux » selon la terminologie qui regroupe les différents types d’anxiétés ? On peut simplement définir ces troubles anxieux comme un ensemble de différents symptômes incluant principalement un sentiment de peur, d’inquiétude qui vont nous faire adopter des comportements afin d’éviter des situations particulières.

L’anxiété est une émotion habituelle que nous avons tous expérimenté tous dans des situations ou des moments particuliers.

Cette anxiété ne pose pas de problème si elle ne survient que de façon épisodique, si elle est provoquée par des facteurs favorisants réels (entretien d’embauche, rendez-vous amoureux, prendre la parole en public) et si elle ne dure pas dans le temps. Bien sûr, elle sera anormale si elle a des conséquences négatives sur notre existence en nous empêchant de faire des choses importantes. 

Elle sera aussi anormale si elle se traduit par des symptômes excessifs ; manifestations physiques ; peur panique, sensation d’angoisse qui nous bloque au quotidien.

Ces troubles anxieux peuvent dans certains cas diminuer nos capacités intellectuelles (concentration, mémoire), affectives, sociales (peur de sortir, de conduire, de rencontrer des gens).

Il existe plusieurs échelles d’anxiété ; celle qui est accessible en fin de texte est utilisée régulièrement dans la recherche médicale et permet de se tester facilement en moins de 5 minutes (7 questions avec une grille de score).

Les troubles anxieux sont présents chez environ 10 % de la population générale, mais sont bien plus fréquent en cas de consommation excessive d’alcool. Chez les consommateurs excessifs, leur fréquence peut atteindre des taux de plus de 40 %. 

Il existe donc une association fréquente entre consommation excessive d’alcool et troubles anxieux, cette association s’inscrit dans le cadre d’une « pathologie duelle », c’est à dire l’association d’une consommation de produit psychoactif (par exemple l’alcool) et d’une pathologie psychiatrique (telle dépression, anxiété, trouble bipolaire…). 

La première explication rendant compte de cette forte association est que l’alcool est fréquemment utilisé comme une « auto-médication » afin de pouvoir gérer au quotidien les difficultés engendrées par les désordres anxieux. Effectivement, une prise d’alcool peut diminuer l’anxiété dans un premier temps, même si cet effet « positif » va rapidement s’inverser avec la chronicité de la consommation, l’alcool favorisant et aggravant alors l’anxiété. 

Un des troubles anxieux fréquent qui va volontiers favoriser des consommations inadaptées d’alcool est l’anxiété sociale ou la phobie sociale (5 à 7 % des personnes en population générale). Elle se caractérise par une peur excessive et gênante du regard de l’autre dans des situations d’interactions simples ou plus formelles (parler à son banquier, parler en public). L’anxiété sociale se complique particulièrement d’addiction en général et à l’alcool en particulier.

Une deuxième explication possible est que la consommation chronique d’alcool est un facteur d’anxiété et c’est d’ailleurs ce qui est observé sur des séries importantes de patients ; l’arrêt de l’alcool s’accompagne d’une diminution de la fréquence et de l’importance de l’anxiété. L’effet négatif de l’alcool sur l’humeur est donc réversible et une diminution très importante de l’anxiété survient dès les premières semaines qui suivent l’arrêt de consommation.

Par exemple dans une étude récente, il a été montré que les taux d’anxiété étaient de 44 % lors de l’admission dans un service d’alcoologie et de seulement 15 % après 5 à 6 semaines d’abstinence, soit quasiment 3 fois moins fréquent.

Ces résultats sont obtenus avec un arrêt total de l’alcool et l’impact de la diminution de consommation sera plus progressive. Toutefois, cette diminution est indispensable pour espérer obtenir des résultats positifs.

Enfin, il faut insister sur le fait qu’il y a des interactions entre l’alcool et les médicaments prescrits pour un trouble anxieux et que cela est une raison supplémentaire pour bannir une consommation excessive.

Pour résumer, les troubles anxieux sont souvent très gênants au quotidien. Il ne s’agit qu’une maladie dont il faut avoir honte, mais d’un problème pur lequel il existe des traitements efficaces, médicamenteux ou pas. Il faut donc rechercher de l’aide auprès de soignants. 

Ces troubles sont très fréquents chez les consommateurs excessifs et l’alcool augmente les symptômes et diminue les chances de guérison. Il est essentiel de comprendre que l’alcool ne représente pas un traitement de l’anxiété, mais une cause d’aggravation.

Il est indispensable de limiter au maximum votre consommation d’alcool si vous souffrez d’anxiété, avec toujours une diminution lente et progressive de cette consommation pour éviter des signes de sevrage.

Enfin, insistons sur le fait que traiter un trouble anxieux alors qu’il y a de l’alcool, cela ne fonctionne pas. 

Echelle permettant d’évaluer son anxiété : score HADS (Hospital Anxiety and Depression Scale) de Sigmond et Snaith  

1) Anxiété 

Je me sens tendu ou énervé. 

0. Jamais. 

1. De temps en temps. 

2. Souvent. 

3. La plupart du temps.

J’ai une sensation de peur comme si quelque chose d’horrible allait m’arriver. 

0.  Pas du tout. 

1. Un peu mais cela ne m’inquiète pas. 

2. Oui, mais ce n’est pas trop grave. 

3. Oui, très nettement. 

Je me fais du souci. 

0.  Très occasionnellement. 

1. Occasionnellement. 

2. Assez souvent. 

3. Très souvent. 

Je peux rester tranquillement assis à ne rien faire et me sentir décontracté. 

0.  Oui, quoi qu’il arrive. 

1. Oui, en général. 

2. Rarement. 

3. Jamais. 

J’éprouve des sensations de peur et j’ai l’estomac noué. 

0.  Jamais. 

1. Parfois. 

2. Assez souvent. 

3. Très souvent. 

J’ai la bougeotte et n’arrive pas à tenir en place. 

0.  Pas du tout. 

1.  Pas tellement. 

2. Un peu. 

3. Oui, c’est tout à fait le cas. 

J’éprouve des sensations soudaines de panique. 

0.  Jamais. 

1. Pas très souvent. 

2. Assez souvent. 

3. Vraiment très souvent. 

Résultats : Cette échelle explore les symptômes anxieux.
Votre total peut varier de 0 à 21 points. 

De 0 à 7 : probablement pas d’état anxieux.

Entre 8 et 10 : état anxieux possible mais douteux.
Au-delà de 10 : état anxieux certain. 

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STRESS ET CONSOMMATION D’ALCOOL CHEZ LA FEMME

Femmes et Alcool – épisode 2

Les 10 années qui viennent de s’écouler, la fréquence des problèmes d’alcool augmente plus vite chez les femmes que chez les hommes : précisément 2,5 fois plus vite. À l’échelle d’une population, il s’agit de chiffres très importants. Cette différence ne peut donc pas être due simplement au hasard et il est donc fondamental d’en comprendre les raisons. 

Une des causes majeures suspectée est que les consommations féminines excessives sont volontiers motivées par le besoin de réguler des états émotionnels négatifs et des antécédents d’évènements de vie perturbants et traumatiques. 

Il est en effet bien démontré que les états émotionnels négatifs sont associés à toutes les phases de l’addiction à l’alcool, c’est-à-dire :

À l’initiation de la consommation

À la poursuite de la consommation 

Aux éventuelles rechutes 

Cela est vrai pour les hommes et les femmes, mais l’impact des états émotionnels négatifs est beaucoup plus important chez les femmes. Entre parenthèses, il existe d’autres domaines de la maladie alcoolique dans lesquels on observe une grande susceptibilité féminine, ce qui sera l’objet de prochains textes. 

L’ÉTAT ÉMOTIONNEL DANS L’ADOLESCENCE ET L’INITIATION DE LA CONSOMMATION

Ce qui nous arrive dans l’enfance ou l’adolescence nous marque particulièrement. Pendant ces périodes, ceux qui ressentent de façon prolongée des émotions négatives ont plus de risque de commencer l’alcool précocement et surtout d’aller vers des consommations plus fréquentes et importantes. Par exemple, il a été montré que chez des adolescents âgés de 15 à 18 ans, l’importance des symptômes de dépression était associée à des débuts de consommation plus précoce et des risques accrus d’évoluer vers la dépendance. 

Cela est vrai chez les garçons et les filles, mais l’association entre des difficultés émotionnelles et la prise d’alcool est plus forte chez les filles. Donc, le risque de boire de l’alcool pour faire face à un état émotionnel négatif est plus important chez les filles.

De même, la maltraitance dans l’enfance est un facteur bien documenté de risque de plusieurs pathologies à l’âge adulte incluant le mésusage d’alcool. Là encore, les jeunes femmes ont au moins 2 fois plus de risque de développer un mésusage d’alcool que les hommes de leur âge après avoir subi dans l’enfance un abandon affectif, une maltraitance psychologique ou un abus sexuel. 

Donc, il y a plus d’impact et plus de risque d’aller vers l’alcool pour se défendre d’états émotionnels négatifs chez les femmes que chez les hommes. Cela n’est pas lié à une moindre compétence ou force morale chez les femmes, mais à des différences neurobiologiques présentes dans l’adolescence, différences qui commencent à être bien documentée. Il n’est bien sûr, pas utile de préciser que les circuits neurobiologiques qui différent ne représentent pas le quotient intellectuel. 

LA MORPHOLOGIE CEREBRALE DANS L’ADOLESCENCE

Pendant l’adolescence, le cerveau se développe tant d’un point de vue anatomique que fonctionnel. Cette maturation dure longtemps et ne s’achève que vers l’âge de 25 ans. Durant cette période, un stress prolongé et intense va se traduire par des modifications de fonctionnement, mais aussi va altérer le développement de certaines zones qui sont encore en pleine maturation. Ces problèmes de développement vont concerner plusieurs zones du cerveau qui sont justement impliquées dans la réponse à l’alcool*. 

Comme ces zones vont moins bien fonctionner, l’alcool aura moins d’effet anti-stress ce qui va se traduire par le besoin de consommations plus importantes pour avoir un même effet. 

Or, à l’adolescence, les cerveaux des filles et des garçons ont certaines différences fonctionnelles qui semblent expliquer la susceptibilité accrue des jeunes filles à l’alcool pour combattre les états émotionnels négatifs. 

LE CERVEAU À L’ÂGE ADULTE

Des différences entre les cerveaux féminins et masculins persistent à l’âge adulte avec donc toujours plus de susceptibilité à consommer de l’alcool chez les femmes pour combattre le stress. En effet, il existe des interactions entre les réseaux neurologiques du stress et ceux qui conditionnent la réponse à l’alcool. De plus, il existe des changements liés au stress dans les circuits de la récompense qui sont excités par les prises d’alcool. 

Cela se traduit par plus de réponse alcool au stress chez les femmes avec :

  • Un début de troubles de l’usage plus précoce 
  • Plus de « craving » (c’est-à-dire des envies violentes et irrépressibles d’alcool)
  • Plus de « binge drinking » (consommations excessives en un temps court)
  • Plus d’usage problématique et de dépendance à l’alcool 
  • Plus de risque de rechute chez les femmes qui essaient de diminuer leur consommation

Il n’est pas étonnant qu’il y ait plus souvent chez les femmes consommatrices (par rapport) aux hommes) des co-morbidités psychiatriques : plus de dépression, plus de troubles anxieux, plus de stress post-traumatique.

En effet, les femmes ont des raisons « neurologiques » de répondre plus fréquemment que les hommes aux états émotionnels négatifs par une consommation d’alcool. 

Mais il existe au moins une autre cause de vulnérabilité : une spécificité hormonale.

LES HORMONES SEXUELLES FAVORISENT LE LIEN ENTRE STRESS ET ALCOOLISATION

Une différence physiologique importante entre les femmes et les hommes est la différence de production hormonale. Or, les deux principales hormones ovariennes modifient la réponse au stress. 

Tout d’abord, la progestérone pourrait contribuer à l’effet anxiolytique de l’alcool chez les femmes, ce qui évidemment est un facteur favorisant la consommation en cas de stress ou syndrome anxieux. 

D’autre part, les estrogènes pourraient interagir dans les circuits neurologiques responsables de la motivation pour la récompense, ce qui n’est pas le cas chez l’homme. Les estrogènes favorisent donc les prises d’alcool, et il est démontré que les femmes qui ont des taux élevés d’estrogènes consomment plus d’alcool que celles qui ont des taux plus bas. On sait aussi que la consommation d’alcool peut varier en fonction du moment du cycle menstruel.

Ainsi, les hormones ovariennes peuvent favoriser la consommation d’alcool, en particulier lorsqu’il existe des antécédents de stress et de difficulté de régulation des émotions.

EN RÉSUMÉ :

Que faut-il retenir de ces données ?

Les états émotionnels négatifs de même que les antécédents de stress sévères favorisent la consommation d’alcool de façon plus importante chez les femmes que chez les hommes. 

Cela semble lié à des différences neurologiques tant dans la jeunesse qu’âge adulte. Il semble aussi que les hormones ovariennes jouent un rôle important dans cette susceptibilité féminine. 

Il vous faut donc être très vigilante si vous souffrez de dépression, de troubles anxieux ou de stress actuellement ou si vous en avez souffert dans vos antécédents, même lointain. Il faut vous occuper de vous et ne pas hésiter à consulter au moindre doute afin de développer et renforcer des stratégies d’adaptation et de régulation des émotions.

Soigner votre humeur diminue les risques de consommation excessive d’alcool. Et bien sûr, il faut éviter d’avoir une consommation excessive d’alcool qui est pour sa part responsable de troubles de l’humeur et donc entretien un cercle vicieux.

*Pour information, les zones dont nous parlons sont principalement le corps calleux, le cortex cingulaire antérieur, l’amygdale, l’hippocampe