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Sexe et alcool : que faut-il arrêter ?

Quand les consommations excessives ne sont plus d’actualité, quels sont alors les bénéfices sur la sexualité ?

Nous avons déjà vu dans un texte précédent que la consommation excessive d’alcool favorisait les dysfonctions sexuelles. Dans les études effectuées chez des patients hospitalisés pour un sevrage d’alcool (arrêt de l’alcool chez des patients dépendants avec une surveillance médicale en hospitalisation), il apparaît qu’au moins 70 % d’entre eux avaient souffert de dysfonctions sexuelles l’année qui précédait l’hospitalisation. Les difficultés résultaient de l’atteinte d’au moins l’une des trois dimensions clés de la sexualité c’est-à-dire le désir, l’excitation ou la capacité à atteindre l’orgasme. Très souvent, plusieurs dysfonctions sexuelles étaient associées. Chez les hommes, une baisse de désir sexuel et une dysfonction érectile (manque de rigidité) pouvaient être associés, chez d’autres hommes, une éjaculation prématurée et une dysfonction érectile peuvent être présentes. Chez les femmes, cela pouvait être l’association d’une baisse de désir, d’une sécheresse vaginale occasionnant des douleurs pendant les relations sexuelles et d’une difficulté à atteindre l’orgasme. 

Lorsqu’il une consommation excessive d’alcool associée ou non à une dépendance à l’alcool, la grande fréquence des dysfonctions sexuelles est mise en évidence à la fois chez les hommes et chez les femmes.

Ces troubles sexuels ont un impact important sur la qualité de vie individuelle mais aussi conjugale.

UNE FOIS SOBRE,

on peut donc se demander ce qui se passe après arrêt de sa consommation. Grâce à plusieurs études faites sur ce sujet, nous avons des réponses assez précises à donner. 

Globalement, l’abstinence s’accompagne d’une amélioration portant sur les trois dimensions de la sexualité déjà citées, soit le désir, l’excitation (érection ou lubrification vaginale) et l’orgasme. 

Chez l’homme, l’évolution de la dysfonction érectile a été particulièrement étudiée car ces troubles sont évalués par des critères physiques objectifs plus simples à mesurer : rigidité suffisante pouvant permettre la pénétration ou insuffisante. Pour donner un ordre de grandeur, il a été montré que l’abstinence permettait de diviser par 10 la fréquence des troubles de l’érection chez des patients gros consommateurs d’alcool. Il s’agit donc d’une diminution particulièrement significative.

Les autres dysfonctions s’améliorent aussi, mais généralement de façon moins spectaculaire ou avec une évaluation plus subjective, tant chez l’homme que chez la femme. Pour ces dernières par exemple, il a été montré une augmentation du désir, une plus grande capacité à être excitée et surtout une augmentation de la capacité à atteindre l’orgasme lors d’une relation sexuelle. 

DANS QUEL DÉLAI ?

Ces résultats sont très positifs, mais il faut préciser que ces récupérations demandent un certain délai. Une semaine après l’arrêt de l’alcool, il ne faut pas espérer une récupération totale des troubles dont on pouvait souffrir. Les données disponibles stipulent qu’une normalisation survient en moyenne dans les 3 premiers mois suivant l’arrêt de l’alcool. 

Attention, il ne s’agit toutefois pas d’une loi absolue pour plusieurs raisons :

  • Tout d’abord, certaines fonctions peuvent mettre plus de temps à rétablir. Cela va dépendre de l’ancienneté des troubles, du degré de sévérité et des conditions, du contexte dans lequel l’abstinence ou la sobriété survient. Si les troubles sont sévères, le temps nécessaire à une bonne récupération sera forcément supérieur.
  • Deuxièmement, il est possible que les dysfonctions sexuelles aient d’autres facteurs favorisant que la consommation d’alcool. Nous pouvons citer par exemple le tabagisme ou la prise d’une autre drogue, certains traitements médicamenteux, une maladie vasculaire, un diabète sévère, etc…
  • Parfois ce sont des traits de personnalité et des facteurs émotionnels qui vont pérenniser les troubles sexuels. Ainsi, l’anticipation de « l’échec », que les sexologues appelent anxiété de performance, peut favoriser l’absence ou la perte d’érection. De même, l’appréhension de la douleur peut altérer le désir et l’excitation sexuelle, favoriser les tensions corporelles et la contraction des muscles du périnée, tout cela favorisant les douleurs lors des relations sexuelles.
  • Enfin, la qualité de la relation de couple joue un grand rôle :  les habilités sexuelles de l’un et de l’autre, l’existence de dysfonctions sexuelles chez le (ou la) partenaire, les habilités relationnelles, la qualité de la communication, la présence d’interprétation erronées sur l’origine des troubles etc…
  • Voici quelques exemples d’interprétation erronées : « mon compagnon n’a pas d’érection , c’est qu’il ne me désire pas, ou qu’il me trompe ». Or en fait les troubles de l’érection peuvent tout à fait survenir quand le désir est bien présent et en l’absence de toute relation extra-conjugale. 

Ainsi, si une dysfonction persiste après l’arrêt de l’alcool, il faut en parler à son médecin pour qu’il puisse rechercher une maladie associée. 

En pratique clinique certaines récupérations sont beaucoup plus lentes et un retour à une sexualité satisfaisante ne survient qu’après 9 ou même 12 mois. Certaines dysfonctions sexuelles peuvent persister en l’absence d’approche spécialisée en médecine sexuelle ou sexologie, même si, comme nous l’ avons dit précédemment, une normalisation survient en moyenne dans les 3 premiers mois suivant l’arrêt de l’alcool.

IMPACT SUR LA VIE DE COUPLE ET LA QUALITÉ DE VIE:

Cette amélioration des fonctions sexuelles se traduit le plus souvent par une vie de couple plus harmonieuse. Ainsi, il a été démontré que lorsqu’un partenaire qui avait une consommation excessive d’alcool devient abstinent, l’intimité sexuelle du couple redevient généralement normale et comparable à celle de couple n’ayant jamais connu l’alcool.

Donc, même si un certain délai est nécessaire, un retour à la normale est tout-à-fait possible. La vie intime du couple redevient satisfaisante et dans la mesure où il s’agit d’un élément important de la qualité de vie en général, cela contribue à améliorer celle-ci.

UN EFFET DÉLÉTÈRE DU SEVRAGE SUR LA SEXUALITÉ EST-IL POSSIBLE ? 

Tous ces résultats sont positifs mais il faut toutefois amener une réserve. En effet, il peut arriver que le sevrage alcoolique provoque, en particulier chez les hommes, des dysfonctions sexuelles transitoires alors qu’il n’existait aucune plainte auparavant. Il peut s’agir de troubles du désir et/ou de l’excitation (troubles de l’érection). Cela peut être très perturbant pour les patients qui se demandent s’il s’agit d’un trouble transitoire ou non. De plus, cet effet secondaire (tout de même rare) du sevrage est parfois un facteur de risque de rechute. En fait, après quelques semaines au maximum, les fonctions sexuelles reviennent à la normale. Pas de panique, ça va revenir et souvent même en mieux. 

Si un tel trouble survient, il est fondamental de ne pas s’affoler et de ne pas rajouter à l’effet du sevrage un stress de la performance.  Et si besoin, il ne faut pas hésiter à consulter son médecin traitant afin de faire le point, avoir une aide pharmacologique (traitement médicamenteux) ou être adressé à un sexologue. 

Enfin, chez certaines personnes l’absence d’alcool ou de drogues peut révéler des difficultés sexuelles. Une accompagnement en sexologie est alors indiqué pour ne plus avoir besoin de produits pour vivre la sexualité.

QUEL EST L’IMPACT D’UNE DIMINUTION DE LA CONSOMMATION D’ALCOOL ?

L’impact d’une diminution de consommation d’alcool sur les fonctions sexuelles est mal connu. Toutefois, il est bien démontré qu’il existe un lien direct entre l’importance des quantités consommées et l’importance des troubles sexuels. 

Par exemple, chez l’homme, la qualité de l’érection (taille et dureté du pénis permettant la pénétration) est diminuée de façon dose-dépendante : c’est-à-dire que plus il y a d’alcool et moins il y a de rigidité pénienne.

On peut donc spéculer que moins il y a d’alcool et moins il y aura de dysfonction sexuelle. C’est d’ailleurs conforme à ce qui est régulièrement observé en consultation. 

Il est assez simple DE CONCLURE CE TEXTE : pour retrouver une bonne qualité de vie sexuelle et harmonieuse il faut aller vers une consommation d’alcool la plus basse possible voire une abstinence totale lorsque le contrôle des consommations d’alcool est impossible. 

Vous sentirez la différence… votre partenaire aussi !

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EN CAS DE SEVRAGE ALCOOLIQUE, FAUT-IL SE MÉFIER DES BENZODIAZÉPINES ?

Le sevrage alcoolique est un des outils de prise en charge possible chez certains patients ayant un problème d’alcool. Dans ce cas, un traitement médicamenteux par benzodiazépine peut être proposé. Nombreux sont ceux qui se questionnent quant à la pertinence de ces médicaments et de leurs éventuels effets négatifs. Ce questionnement est tout à fait justifié et mérite une courte mise au point sous forme de 4 questions réponses. 

1°) QUELS SONT LES OBJECTIFS DU SEVRAGE ? 

L’objectif du sevrage est, pour le consommateur, l’arrêt de l’alcool pour entrer dans un processus d’abstinence. 

Pour le soignant, l’objectif est d’assurer cet arrêt dans de bonnes conditions de confort et de sécurité.

Les « bonnes conditions de confort » sont essentielles car elles vont rendre l’arrêt de l’alcool moins difficile. En effet, les premiers jours sont parfois compliqués pour certains patients. De plus, cela permettra de faire du sevrage une expérience positive et valorisante = je m’en sors bien, ce n’est pas trop difficile et je sens bien que je vais dans la bonne direction.

Les bonnes conditions de sécurité signifient que la prise en charge doit permettre de limiter les signes de sevrages (voir tableau 1) et surtout d’éviter la survenue d’un syndrome de sevrage sévère (voir tableau 2).

C’est en s’appuyant sur ces objectifs fondamentaux que les modalités thérapeutiques sont mises en œuvre. 

 TABLEAU 1 : SIGNES DE SEVRAGES

Troubles subjectifs Anxiété, agitation, irritabilité, insomnies, cauchemars
Troubles neurovégétatifs Sueurs, tremblements, tachycardie, hypertension artérielle
Troubles digestifs Anorexie, nausées, vomissements

TABLEAU 2 : SIGNES DE SEVRAGE SÉVÈRES

Confusion, c’est à dire troubles de concentration, mémoire, et/ou jugement
Hyperthermie (température augmentée)
Hallucinations
Delirium tremens
Convulsions

2°) QUEL EST L’INTÉRÊT DE LA PRESCRIPTION DE BENZODIAZEPINES ? 

La prescription de benzodiazépine a pour objectif d’éviter (ou de maintenir à un niveau très bas) les signes de sevrage. 

Il est très important d’insister sur le fait que des signes de sevrage peuvent survenir, même s’il n’y a pas d’arrêt total d’alcool. En effet, en cas de forte consommation, une diminution importante sans arrêt total peut se compliquer de signes de sevrage.   

La prescription de benzodiazépines évite aussi le risque d’évolution vers un sevrage sévère lorsqu’il y a déjà quelques symptômes. Entre parenthèse, il y a une scène de delirium tremens très impressionnante, jouée par Yves Montand dans le film « Le cercle Rouge » (le reste du film est aussi très bien…).

D’ailleurs, depuis la généralisation de la prescription de benzodiazépine comme traitement préventif lors des sevrages hospitaliers, il n’y a quasiment plus de delirium tremens dans les unités d’addictologies, ce qui démontre leur grande efficacité.

Les benzodiazépines choisies sont celles qui ont une ½ vie longue, c’est à dire celles dont l’absorption ne s’accompagne pas de taux très élevés dans le sang suivis peu après par des taux très bas (ce qui est très inconfortable pour le patient et difficile à gérer pour le médecin).

3°) QUELS SONT LES RISQUES DES BENZODIAZEPINES ?

Les benzodiazépines sont des médicaments potentiellement addictogènes. On comprend donc dans ces conditions celles et ceux qui ont peur d’abandonner une drogue pour développer une dépendance à une autre. Pour être exhaustif, il faut aussi dire aussi qu’il est plus long et plus difficile de se « débarrasser » d’une dépendance aux benzodiazépines que d’une dépendance à l’alcool.

De plus, les benzodiazépines consommées au long cours pourraient avoir une toxicité cérébrale. Là aussi, il est donc sain de s’en méfier.

Toutefois, ces deux effets secondaires ne vont survenir qu’en cas de prescription prolongée. Or, pour un sevrage, les sociétés savantes préconisent une durée de traitement autour de 7 jours. Si cela est respecté, il n’y a aucun risque de développer une dépendance ou une toxicité cérébrale. La prescription de benzodiazépines ne sera maintenue au-delà du délai de 7 jours que s’il existe une indication psychiatrique, par exemple un trouble anxieux. Cependant le traitement au long court des troubles anxieux ne doit pas reposer sur les benzodiazépines.

Enfin, il faut parler d’un troisième risque qui est l’association d’une benzodiazépine à l’alcool. On note parfois chez certaines personnes qui re-consomment de l’alcool après sevrage la prise concomitante de benzodiazépine (qui devrait pourtant être stoppée). Cette association peut donner des troubles de la vigilance et favoriser tous types d’accidents. 

Ces trois problèmes potentiels ne surviennent jamais lorsque le traitement est stoppé dans les 7 jours ainsi que recommandé. 

4°) COMMENT GÉRER AU MIEUX LES DOSES DE BENZODIAZEPINES ? 

Tout d’abord, il faut préciser qu’un traitement par benzodiazépines n’est pas toujours indiqué. En l’absence de tout signe de dépendance physique et sous réverse d’une surveillance étroite, l’arrêt de l’alcool peut se faire sans médicament. Les consommateurs qui arrêtent seuls le savent bien. 

Toutefois, il faut toujours être vigilant et le moindre symptôme justifie la prescription de benzodiazépine.

Il s’agit généralement de doses qui sont rapidement régressive pour arriver à l’arrêt vers le 7e jour. Bien sûr, les adaptations de posologie ne doivent se faire qu’avec une surveillance médicale.

On peut osciller entre le sous-dosage (qui se traduit par des signes de manque) et le sur-dosage (qui se traduit par une somnolence). Cette période de sevrage accompagnée par des benzodiazépines n’est pas le bon moment pour des activités à risque telles que bricoler sur le toit ou conduire sa voiture.

Pour être complet, il faut préciser que d’autres traitements sont volontiers proposés au moment du sevrage, telles les vitamines B1, voire B1 + B6. Ces traitements peuvent être très importants chez certains patients mais ils ne remplacent pas les benzodiazépines car ils ne préviennent pas les signes de sevrage et le delirium tremens.

EN CONCLUSION, les BENZODIAZEPINES sont souvent très utiles pour aider au sevrage alcoolique. Leur prescription peut même être indispensable dans certains. Elles ne présentent pas de risque (sauf un peu de somnolence) si leur prescription suit les recommandations officielles, c’est-à-dire sont limitées à une courte période

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Alcool, quelles sont les doses à risque ?

LES SEUILS DE CONSOMMATION À RISQUE :

Il n’est pas possible actuellement de se prononcer de façon formelle sur les doses qui sont sans « aucun risque » pour la santé.

Depuis des années, la Société Française d’Alcoologie (SFA) recommande de ne pas dépasser une consommation moyenne de 3 verres / jour chez l’homme et de 2 verres / jour chez la femme.

Des limites un plus basses ont été récemment proposées par Santé Publique France : ne pas consommer plus de deux verres standard par jour ; avoir des jours sans consommation dans une semaine ; ne pas consommer plus de dix verres standard par semaine

En résumé:

« Pour votre santé, l’alcool,
c’est maximum deux verres par jour et pas tous les jours. »

Ces limites représentent les seuils de faible toxicité de l’alcool, c’est à dire la consommation inférieure ou égale à ces quantités ne donne pas de risque de surmortalité.